Le petit d'Homme
Juste une pensée pour un petit garçon croisé au détour d’une marche en brousse samedi dernier.
Cette rencontre fugace m’a énormément touché et je me suis surprise à repenser avec émotion et un sentiment d’impuissance profond à ce jeune broussard (ce terme n’est absolument pas péjoratif et désigne simplement les habitants de la brousse).
Mais avant tout, je me sens obligée de replacer cette rencontre dans son contexte plus que surprenant !
Samedi, 17h, une randonnée a été organisée en brousse. Le breton et moi y allons à reculons, invités par nos hôtes.
C’est à ce qu’il paraît LE rendez-vous du week-end.
17h15 : arrivée sur les lieux du crime…
17h17 : le breton et moi nous demandons vraiment où nous sommes tombés… Cernés par une horde de 4x4 rutilants.
17h20 : présentés par nos hôtes, nous saluons l’ambassadeur. Révérence et pyramide de Ferrero.
17h28 : je me suis définitivement enfermée dans une bulle d’autisme.
17h30 : la horde s’élance, qui marchant, qui courant.
17h40 : après 10mn de fous rires contenus et d’échanges de regards hallucinés, le breton et moi nous détachons du reste du groupe.
S'ensuivent une heure de marche en plein cagnard, la traversée d’un minuscule village niché au milieu de nulle part, la découverte de paysages dignes d’Out of Africa et nous retournons au point de rendez-vous.
Je me retire à nouveau dans ma bulle d’autisme.
Et, soudain, je me retrouve côte à côte avec un jeune garçon. 10 ans à en croire sa taille. 12 peut-être, la malnutrition aidant.
Le contraste est saisissant.
Moi, blanche aux yeux clairs, bras croisés sur la poitrine, tournant résolument le dos à cette bande de toubabs suants.
Lui, ventre gonflé et yeux d’ébène écarquillés, tournant le dos à son village et contemplant, d’un regard bien trop grave à mon goût, tous ces blancs aux chaussures de sport rutilantes et aux 4x4 flamboyants.
Cela a duré 10 secondes peut-être.
10 secondes pendant lesquelles j’ai retenu mon souffle et ai été submergée par l’émotion.
Ou, devrais-je dire, une foule d’émotions : honte de ce que je représentais à cet instant précis, sentiment d’impuissance profond face à ce regard qui en disait si long, mais aussi une folle envie de le serrer contre moi.
Puis, nos regards se sont croisés. Il s’est reculé, je me suis éloignée, impuissante encore une fois.
Je voudrais juste lui dire que, malgré nos différences, je ne l'oublierai pas.
Un vrai petit d'Homme.
Edit : ce qui peut apparaître ici comme du sentimentalisme, certains l'auront peut-être expérimenté au cours de leurs voyages. C'est une simple rencontre comme il y en a des centaines, mais certaines vous touchent plus que d'autres. Et j'ai tenté d'y mettre des mots.